Le monument aux toréadors du monde à Céret |
La Féria de Céret a lieu cette année du 11 au 14 juillet et attire comme à son habitude de nombreux aficionados venus du monde entier pour assister aux célèbres corridas ayant lieu dans les arènes de la ville. Parallèlement, on peut voir depuis plusieurs semaines dans les rues de Céret et sur le marché les groupes d'opposants à la corrida venant faire valoir leurs arguments sur la cruauté envers les animaux. Entre art, tradition et vues divergentes sur le bien-être des animaux, la polémique sur la corrida ne date pas d'hier, ainsi que le montre l'article retranscrit ci-dessous et paru en 1894. Il y a 120 ans exactement avait lieu la première corrida de Céret avec mise à mort.
Le Gaulois, 8 octobre 1894
LES COURSES DE TAUREAUX
Le juge de paix de Céret vient de condamner à un franc d'amende M. Agremont André, directeur des arènes de Céret, qui, lors des courses de taureaux données à l'occasion de la fête locale de cette ville, fit mettre à mort des taureaux par des toréadors espagnols.
Les Nîmois ont donc grand tort de protester si bruyamment contre l'arrêté préfectoral
qui a interdit la mise à mort du taureau. Ils n'ont qu'à le considérer comme non avenu, puisque ça ne coûtera à la direction des arènes qu'un franc par corrida !
***
Encore faudra-t-il que le juge de paix de Nimes se montre aussi sévère que celui de Céret.
A Bayonne, les juges sont encore plus indulgents. C'est ainsi que le tribunal civil a acquitté, hier, sur les conclusions du ministère public, l'administrateur des arènes bayonnaises, poursuivi comme civilement responsable d'une infraction à la loi Grammont, à la suite de la mise à mort de cinq taureaux et de dix chevaux.
Le jugement est longuement motivé ; les considérants portent que les arènes ne peuvent pas être considérées comme lieu public ; que la loi Grammont n'est pas applicable aux courses espagnoles, postérieures à la promulgation de la loi ; les chevaux sont considérés comme propriété privée.
C'est le quatrième acquittement prononcé par les juges de ce même tribunal. Le prononcé du jugement a été applaudi.
Maitre Z.
Quelques commentaires, tout d'abord sur la Loi Grammont et ensuite sur la corrida à Céret en 1894.
La Loi Grammont du 2 juillet 1850
« Seront punis d'une amende de cinq à quinze francs, et pourront l'être
d'un à cinq jours de prison, ceux qui auront exercé publiquement et
abusivement des mauvais traitements envers les animaux domestiques. »
Le député Jacques Delmas de Grammont (1796-1862), auteur de la loi, ne semble pas lui-même se soucier des courses de taureaux avec cette loi puisqu'il préside les arènes de Bayonne lors des premières corridas de 1853, tenues en présence de l'impératrice Eugénie, d'origine espagnole. Toutefois, en 1884, le ministre de l'intérieur Pierre Waldeck-Rousseau étend l'application de la loi aux corridas sans que cela soit clairement dit dans les textes. Il faut attendre un arrêt de la cour de cassation du 16 février 1895, soit à peine quelques mois après les événements narrés ci-dessus, pour que le taureau soit considéré comme un animal domestique et entre donc officiellement sous la protection de la loi Grammont. Par la suite, la corrida est souvent tolérée et la nouvelle loi de 1951 qui sanctionne la cruauté envers les animaux domestiques précise qu'elle n'est pas applicable aux courses de taureaux lorsqu'une tradition ininterrompue peut être évoquée. Plusieurs communes du département des Pyrénées-Orientales ont une tradition de corrida reconnue mais seules deux la pratiquent encore, Céret et Millas.
La corrida à Céret en 1894
La tradition des courses de taureaux est connue à Céret depuis le Moyen Âge. Des arènes ont existé au XIXème siècle en différents endroits de la ville : place du château, place du Barri, près de la Fontaine d'Amour, et en 1894 au croisement de l'avenue Clémenceau et de la rue Jean Amade. A cette date, l'adjudication des courses de taureaux, souvent organisées pour la Saint-Ferréol (mi-septembre), est attribuée à deux associés, André Agremon [sans t], marchand de bois à Céret, et Jean Bousquet. Ils sont les premiers à introduire à Céret les courses de taureaux à l'espagnole, avec mise à mort pour deux taureaux cette année-là, et des toréadors espagnols sont invités pour l'occasion. Malgré l'interdiction des mises à mort par arrêté du préfet le 28 septembre, il semble que le spectacle ait eut lieu puisque l'article du Gaulois confirme la condamnation d'Agremon à une amende d'un franc, ce qui est loin d'être dissuasif. Il n'y aura toutefois pas de mises à mort l'année suivante, mais celles-ci reprendront dès 1896.
Sources :
* Gallica
* Pierre Cantaloube, Céret et les ponts du Tech, Saint-Estève (Pyrénées-Orientales), Les Presses Littéraires, coll. « Le Tech et ses franchissements », 2004, 2e éd., ISBN 2-35073-009-3
* Wikipédia (infos diverses)
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Bonjour,
RépondreSupprimerserait-il possible que je partage les anecdotes de la ville de Céret sur le groupe Facebook "T'es originaire de Céret si ..." (https://www.facebook.com/groups/517949571647949/). Si vous d'accord je mettrais bien sur un lien vers votre blog.
Merci
Nicolas Dunyach
Bonjour. Vous pouvez partager bien sûr (je suis l'activité de ce groupe). Je ne sais plus si je l'ai déjà fait, à moins que ce ne soit sur un autre groupe (Céret ou Vallespir). Merci en tout cas.
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