C'est l'histoire d'un drame d'apparence banale que nous relate le quotidien L'Espérance du 4 janvier 1882. Mais grâce à ce fait divers, c'est également un type d'information rarement écrite qui est parvenu jusqu'à nous. En effet, les familles de guérisseurs sont souvent connues localement mais leur réputation se fait généralement par le bouche à oreille et leur souvenir se perd alors avec l'ensemble du savoir oral au gré des générations. Le journaliste de l'époque a sans doute tenu à leur rendre hommage.
Le centre de Vivès |
Palalda, 2 janvier.
Dans le courant de la semaine dernière, un homme originaire de Serrallongue, garçon muletier à la métairie Aldaï, territoire de Palalda - suivait sur la grand-route, entre Céret à Amélie-les-Bains, une lourde charrette chargée de farine.
Chemin faisant, tout en causant avec le charretier, il fit un faux pas, tomba sous le véhicule, et une roue lui broya la jambe droite.
On mit le pauvre estropié sur la charrette et on le conduisit à la métairie Aldaï, laquelle appartient à la famille de Lourdoueix.
Lorsqu'il fut reposé, on le porta à Vivès, chez MM. Noé. De père en fils, les Noé reçoivent le don de remettre les fractures.
Il parait cependant que pour ce pauvre malheureux, l'amputation deviendra nécessaire, tellement sont broyés les os de sa jambe.
Les Noé, aussi bien ceux de Vivès que ceux de St-Michel-de-Llotes, rendent d'admirables services dans le département ; non-seulement ils n'acceptent aucune rémunération, mais ils donnent bien souvent des secours aux malheureux qui viennent implorer leur guérison.
On imagine sans mal la souffrance de ce pauvre muletier qu'il a fallu ramener chez lui avant de se décider à le porter de Palalda à Vivès (16 km de nos jours) pour sans doute au final le ramener ailleurs pour une amputation.
La métairie Aldaï est aujourd'hui mentionnée sur la carte IGN sous le nom de Mas Alday et se trouve en bas de Palalda, près du Tech. Palalda est encore une commune à cette époque, n'étant fusionnée avec Amélie-les-Bains qu'en 1942. Serralongue, village d'origine du muletier, se trouve plus haut en Vallespir.
La famille Noé de Vivès, dans les Aspres, a donné plusieurs maires à la commune, dont le plus connu, Joseph, maire de 1884 à 1902, a également été conseiller général du canton de Céret. Il y a aussi un Dominique Noé vers 1814 et un Jacques Noé de 1919 à 1921.
A Saint-Michel-de-Llotes, en Ribéral, un certain Dominique Noé a aussi été maire de 1830 à 1848 puis de 1852 à 1867.
Ces familles de guérisseurs existent-elles encore de nos jours ? L'annuaire ne montre plus de Noé dans ces deux communes, bien que l'on en trouve encore dans les environs. Cela ne veut pas dire qu"il ne sont plus présent en ces deux endroits ni que leur talent ne ce soit transmis sous un autre nom ou ailleurs. Seuls des habitants de Vivès ou Saint-Michel-de-Llotes pourraient nous en dire plus ?
Sources :
* Article de L'Espérance : Fonds numérisé de la Bibliothèque de Perpignan [domaine public]
* Maires de Vivès : De Vivers à Vivès : du 2ème au 3ème millénaire, mémoires d'un village, Vivès, Mairie de Vivès, 1999
* Maires de Saint-Michel-de-Llotes : MairesGenWeb
Photo : Fabricio Cardenas [CC-BY-SA]
Pour rappel, dans ce même numéro du quotidien L'Espérance : les agissements anti-cléricaux du maire de Pollestres en 1881.
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